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Je ne sais pas si je muris, si je m’assagis. Je sais simplement que j’avance. Je ne comprends pas très bien encore ce que c’est que vieillir. Je me forme. Je continue les projets. Je vois et je refais les mêmes choses quotidiennement. Justement, mon regard sur les choses évolue dans cette répétition incessante des jours qui passent. Naturellement, la vie m’offre des nouveautés de temps à autre, d’une rive à l’autre. Et je pose un regard sur les enfants qui grandissent. Je me forme et pour cela je me déforme ; j’ai déformé mon regard d’enfant, mon regard d’adolescent, mon regard pendant le deuil, mon regard perdu, apeuré, mon regard des jours de fête, et mon regard des jours de reconquête, mon regard dans l’air et les paysages qu’offrent les hauteurs… j’avance et j’ai déformé tant de regards certains, heureux ou malheureux.

Est-ce que l’on a droit de s’inventer des souvenirs ? Ou de broder à ce sujet ? Pas pour frimer mais simplement pour construire son histoire, qu’importe si elle est fausse. L’important d’une vie passée est qu’elle soit belle ou quelle soit vraie ?

Savoir que mon visage t’appartient plus qu’il ne m’appartient même si j’ai beau me regarder, incrédule, dans la glace.

Une photo sort d’une boite et apparait dans un processus chimique. Une photo peut-elle être un souvenir ? Les photos n’ont pas d’odeur, n’ont pas de saveur, ne font pas de bruit. Les photos peuvent-elles témoigner d’une tranche de vie, d’une époque ? Si oui : pourquoi ?

La tête qui dépasse, la tête en avant, la tête nue quand le corps disparait sous les vêtements. Je suis physionomiste à en perdre la raison.

Si l’univers est infini et en mouvement, je suis immortel. Je peux mourir demain ; et renaitre pendant 5 secondes dans les explosions d’étoiles formant une nébuleuse gigantesque ; puis dans une poussière de glace pendant 2,7 secondes dans le ciel du pole nord ; ensuite je serais une galaxie sans commune mesure dans un coin de l’univers ; et ainsi de suite puisqu’il n’y a pas de bornes. Ou bien, s’il y a des bornes, des frontières, c’est qu’il y a quelque chose derrière ; et moi je serais donc aussi derrière le mur pendant 10 min et dans 10 dimensions combinées. Je renaitrais donc sous une multitude de formes jusqu’à la fin des temps qui ne viendront pas. Bah oui ! Et les apparitions fugaces de la structure complexe qui fait mon être, mises bout-à-bout seront ma nouvelle vie. Ma seule crainte est de vivre dans un univers tordu, qui tourne en rond sur lui-même. Dans un tel cas, je serais un immortel piégé comme certains personnages des romans amers de Stephen King.

C’est fou comme je me souviens de ton bras, de ton cou, de ton pied gauche et de la forme de tes orteils. C’est bien là des souvenirs focalisés que j’ai uniquement quand je pense à toi. Tu es si proche, que je te puzzle. Tu es puzzlée. Et je te puzzlerais encore. Car j’aime te puzzler. Mais comment je peux avoir autant de souvenirs en pièce ? Attends. Regarde-moi. Attends. Je prends du recul.

Tous droits réservés © Romain Philippon (images) ; Yann Hamonet (textes 2018), Ben Mazué (textes 2019 & 2020), Johary Ravaloson (textes 2021), Gillian Geneviève (textes 2022)